Session budgétaire 25 mars 2024
Cher Vincent, cher collègue,
Je voudrais revenir sur l’esprit de la réforme du collège, initiée par le PM à l’occasion de ces 5 petits mois qu’il a passé à la tête du ministère de l’Éducation nationale et réforme appelée « choc des savoirs ». J’aimerais que l’on s’y attarde parce que je pense que l’état d’esprit de cette réforme est exactement l’inverse du travail des élu-es de cette Assemblée et du vice-président à l’éducation.
Les groupes de niveaux, impulsés donc par Gabriel Attal qui n’a lui-même, pendant sa propre scolarité, jamais mis les pieds dans un établissement public ni du primaire ni du secondaire, visent à trier les élèves en 3 catégories : les bons, les moyens et les nuls.
Cette réforme a entrainé une mobilisation massive des équipes enseignantes, des parents mais surtout, et c’est remarquable, surtout, la mobilisation du personnel de direction des établissements. Le 13 février dernier, ils étaient plus d’une centaine à manifester leur incompréhension. Pour eux, cette école du choc des savoirs, s’autorise à laisser sur le bas côté les enfants qu’elle rejette.
C’est une rupture gravissime avec la notion d’égalité des chances.
Alors la ministre actuelle de l’EN essaie de camoufler : on parle désormais de groupe de besoin et non plus de groupe de niveau. Peut-être que grâce au langage et à la novlangue des macroniste, on arrivera à « maquiller cette stigmatisation », on va dire « groupe des 15 », « groupe de l’espoir » ou « groupe en cours de validation des acquis », mais le résultat est le même : on sépare les élèves.
On trie, et par là même, on stigmatise, on crée un sentiment de relégation. Et une blessure que l’on reçoit au collège, on peut la garder longtemps. Toute une vie parfois.
Pour illustrer cette injustice, je voudrais reprendre quelques couplets de la chanson des enseignants en collège du territoire de Saint Nazaire et de ses alentours. C’est sur l’air d’une très belle chanson d’Anne Sylvestre qui s’appelle les gens qui doutent.
Y'a celle qui va pas bien parce que à la maison c'est un peu le bazar. Faudrait pouvoir parler, peut-être avec qqun avant le cours d'histoire. Mais y'a pas d'infirmière, y'a que le club "bien être" et la dernière fois, elle a pas pu parler, les mots sont pas venus elle n'y reviendra pas. Celle là on la met où ?
Y'a celle qui débarque des souv'nirs plein la tête tout fraichement d’Ukraine, de 1ère de la classe dans son ancienne école, se retrouve à la traine. C'est grâce à Google trad déjà qu'on lui explique comment s'réinventer, alors si on pouvait, ou pourrait éviter de la stigmatiser.
Celle là on la met où ?
Y'a celle qu'est dyslexique, pour qui les mots s'agitent quand ils sont sous son nez, oui mais quand elle nous parle avec ses mots nous charme sans peur de s'exprimer. Celle qui sur le papier ne fait pas de prouesse et rafle les zéros elle épate toute la classe quand grâce au livre audio elle fait revivre hugo.
Celle là on la met où ?
Bravo les profs pour votre très belle mobilisation. Comme vous, nous pensons qu’une école qui rejette l’hétérogénéité est le reflet d’une société malade qui aurait rompu avec le contrat social et la notion de vivre ensemble.
Plutôt qu’une réforme abjecte de trop, l’école, pour être réellement inclusive a tout simplement besoin de moyens supplémentaires : des profs en plus grand nombre, mieux payé et des classes en petits effectifs.
Je vous remercie.
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